Professor Grewe, quel est votre objectif de recherche ?
J’aimerais trouver comment l’intelligence naturelle fonctionne. Il y a d’importantes différences par rapport à l’intelligence artificielle. Au niveau biologique, le comportement se base sur des buts. Nous voulons atteindre quelque chose et savons comment nous devons nous comporter en fonction de la situation. J’aimerais pouvoir représenter cela en algorithmes. Je rêve d’un assistant virtuel auquel je peux donner des tâches sans devoir lui dire comment il doit les effectuer. Il doit comprendre lui-même comment il peut atteindre ses buts.
Comment vous y prenez-vous ?
D’une part, nous essayons de comprendre le cerveau des souris au moyen d’expérimentations. La souris doit faire quelque chose lorsque la lumière s’allume. Nous regardons quelles cellules s’activent à ce moment-là. Nous aimerions ensuite transférer ce processus d’apprentissage à des systèmes artificiels. La seconde partie de mon groupe travaille sur des réseaux d’IA biologiquement plausibles. Nous développons des méthodes inspirées du cerveau ou adaptons des réseaux d’IA pour qu’ils soient explicables d’un point de vue biologique.
Quels sont les défis ?
Nous savons de ChatGPT qu’il émerveille. Le modèle linguistique a appris à mettre des mots à la file en fonction d’une probabilité statistique. Il n’est cependant pas en mesure d’intégrer un input dans un concept sémantique et de comprendre ensuite sa marge de manœuvre. Les réseaux d’IA se basent sur des principes mathématiques et statistiques, peuvent reconnaître des modèles, mais il leur manque la compréhension pour le contenu ou la signification.
Y a-t-il d’autres points cruciaux ?
Actuellement, ces réseaux d’IA s’entraînent avec des quantités énormes de données. Ce qui exige beaucoup de temps et d’argent. Il s’agit de développer des algorithmes qui apprennent de manière plus effective. Par exemple avec un « Curriculum-Learning » comme c’est le cas chez les enfants. Ces derniers commencent par apprendre des choses simples et construisent là-dessus. Les enfants ne doivent pas faire défiler l’ensemble du répertoire des comportement pour pouvoir les appliquer. Par contre, si on veut entraîner un réseau d’IA avec de nouvelles données, on ne peut pas le faire au moyen d’une actualisation. Il faut un reset ; on recommence donc depuis le début.
En quoi l’AI est-elle déjà implacable ?
Au niveau du volume de savoir grâce au traitement efficient de grandes quantités de données. L’IA est aussi très forte dans le fait de remplir des tâches standards. Mais elle fait des erreurs lorsqu’il s’agit de reconnaître les relations.
Comment travaillerons-nous à l’avenir avec l’IA ?
L’impact le plus grand, je le vois dans les systèmes d’assistance qui nous aident à travailler avec plus d’efficience et plus vite. Ils peuvent traiter des données et des documents 24h sur 24, les résumer et ensuite répondre à nos questions. Il y a encore du potentiel dans ce qu’on appelle les « Action-Transformer ». Ces derniers reçoivent des ordres et exécutent des actions à l’ordinateur : ouvrir des programmes, répondre à des mails, reformater des données, écrire de petits scripts. Cela fera probablement bientôt partie de la réalité.
Où voyez-vous l’IA à l’avenir ?
J’aimerais entraîner un algorithme qui apprend comme un homme et, si possible, qui va avec lui à l’école. Il se spécialiserait dans un domaine. Une telle IA pourrait à l’avenir nous soutenir, d’une certaine manière acquérir des connaissances et résoudre des défis comme nous les hommes ne pouvons plus le faire du fait de la complexité croissante.